Mindalicious

Sex, clichés & the City

Il y a un moment de cela, je discutais avec une amie. Entre deux échanges d’informations cruciales du type « la crème NUXE ça marche vraiment ? « , elle m’apprend qu’une dénommée V. est la risée de tous ces derniers temps. Ma curiosité attisée, je lui en demande la raison:  » La pauvre est allée s’endetter chez COFIDIS pour aller faire la folle aux Galeries Lafayette, et à ce qu’il paraît, S. qui a été chez elle pour récupérer un truc, a trouvé le frigo vide. V. en est à demander 15euros à qui tu sais pour faire les courses !  »

De vous à moi, ma première réaction a été de rire. Ma deuxième a été d’avoir de la pitié pour cette jeune femme. Pas par charité chrétienne, mais plutôt parce que ce n’est pas la première (et sûrement pas la dernière) fois que j’entends ce genre d’histoires la concernant. Le fait d’être interdit bancaire, fichée par la Banque de France et persona non grata auprès de tous les conseillers financiers honnêtes de ce pays (oui il y en a encore) n’a visiblement suffit à la calmer. Soit.
Si je vous raconte cette petite anecdote, ce n’est pas par pur sensationnalisme. En fait, j’aurai sûrement oublié tout çà si je n’avais pas entendu (ou plutôt lu sur un réseau social) cette chère V. se pâmer d’admiration devant le lifestyle d’une certaine…Carrie Bradshaw. Sur le moment, j’ai eu comme un déclic, tout s’expliquait.

Heureux hasard, j’ai été voir Sex & The City 2 quelques jours plus tard.
Que dire ? J’hésitais entre quitter la salle et rester jusqu’à la fin, espérant qu’à un moment ou l’autre, la qualité montrerait le bout de ses stilettos. Quelques scènes m’ont redonné l’espoir, avant que la fin ne vienne tout gâcher.
Je sais très bien qu’il ne faut pas attendre d’un film pareil, la réflexion ou le recul d’un film indépendant par exemple. C’est une production léchée,étudiée et marketée pour les « Pintades » superficielles et qui l’assument. Je le voyais très bien dans la salle d’ailleurs, les filles venaient en bande de dix (ce qui m’a d’ailleurs emmerdée, puisqu’elles demandaient carrément à ceux/Ccelles qui étaient tout(es) seul(e)s sur toute une rangée de s’asseoir ailleurs afin qu’elles puissent rester les unes à côté des autres). Bref, Sex & The City est un divertissement, dont il ne faut rien en attendre mis à part passer un peu de bon temps dans une salle sombre avec un paquet de pop corn et un écran géant.

Donc. Même avec autant de préparation psychologique, j’ai trouvé ce film parfaitement NAZE. Par quoi commencer ? Le mariage du meilleur ami kitsch à souhait ? Cette éternelle fausse fragilité de Carrie ? L’intrigue aussi plate que la chevelure de Miranda ? Au bout de 15 minutes, ayant compris que je n’accrocherai pas, j’ai décidé de concentrer mon attention sur les tenues et accessoires…et ça c’est une autre histoire.
Ca fait combien de temps qu’on nous bassine avec la sortie de ce film ? Grosses affiches, opérations Marketing,  » Café Sex&The City  » en plein Paris *soupir*, vraies fausses rumeurs que l’on fait circuler pour entretenir le buzz…Je me suis volontairement fermée à tout ce manège, mais je n’ai pas résisté à voir ce que Patricia Field (la styliste) nous avait réservé, et autant dire que cette photo de Carrie dans un souk à Abu Dhabi a tôt fait de me faire piger que le flop était annoncé…

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J’veux dire, QUI porte un t-shirt  » J’ADORE DIOR  » en 2010 ? QUI ? Dans ce cas, ressortez vos casquettes VON DUTCH, vos sacs Louis Vuitton au monogramme multicolore et dansez la tecktonik en plein centre commercial ! Je suppose qu’on va me ressortir l’argument de la « Recessionista », qui recycle ses anciens « It », crise oblige. L’argument ne se tient pas, compte tenu du nouveau statut social de Carrie, femme mariée à un homme plus qu’aisé financièrement parlant. Je ne m’attarde pas sur les tenues de Miranda ou Sam (que j’aime pourtant). Côté Style, seule la plus BCBG de toutes, à ma grande surprise, s’en sort le mieux (Charlotte).

Résumons: style complètement kitsch, frisant très régulièrement le mauvais goût + intrigue complètement creuse. Le tout à cause d’une seule et chose : le cliché. Sex&The City, en tant que série, savait être pertinente tout en étant drôle. On avait affaire à 4 femmes, avec leurs défis quotidiens et leurs interrogations existentielles sous couvert de problèmes futiles. Pour illustrer mon propos, disons qu’on partait d’un problème d’un manque de libido (futile) pour en arriver à s’interroger sur son rapport à l’amour et à l’autre (interrogation existentielle). Malheureusement, le 2ème volet cinématographique est encore pire que le premier, tant les stéréotypes et les clichés de la femme urbaine sont maniés sans subtilité. J’avais l’impression d’assister à une représentation quasi-machiste de la femme des années 2010 et plus : superficielle, volage…et conne. Des tas de sociologues n’ont pas arrêté de nous bassiner avec le côté très « réaliste » du phénomène SATC, qui expliquerait son succès.
Ha bon ? On déambule toutes à la maison avec des talons de 15 ? On est toutes  » plus Coco Chanel que Coq-au-vin  » ? Vous vous faîtes fait offrir une bague par votre époux à chaque fois que vous embrassez votre ex ?
Il faut croire que oui puisque la très chère V. dont je parlais au début, a gobé toute cette histoire sans prendre la moindre distance, et se retrouve à avoir des créanciers dans chaque département d’Île-de-France. Pourquoi ? Parce qu’on lui a vendu du rêve: les dîners avec les copines sur les Champs-Elysées dans lesquels on parle coucheries entre deux Pina Colada/Cosmopolitan, les virées Shopping chez Gerard Darel & BCBG Max Azria dont on poste les photos sur Facebook pour faire saliver/parler la populasse, les statuts remplis de  » Mon monsieur Big vient me chercher tout à l’heure, je porte quoi à votre avis ? « ( sachant que l’existence de ce « Monsieur » n’a jamais été prouvée..), j’en passe et des meilleures…Voilà comment elle se retrouve à vouloir reproduire ce qu’elle a vu à la télé et au cinéma.

Tout le monde, moi la première, dirait oui à un train de vie aussi fastueux et parfait. Bien sûr que je souhaiterai m’occuper de savoir quelle paire irait avec mon sac de créateur, au lieu de me prendre la tête à rechercher un appart. Mais je crois que, Dieu merci, je sais encore garder les pieds sur terre et avoir le sens des réalités. Parce que le Glamour, c’est bien beau, mais çà ne paie pas encore les factures ni le loyer. Que l’on emprunte 10.000 euros pour un projet, pour quelque chose de conséquent, ça se comprend, c’est fait pour. Mais emprunter 10.000 euros pour vivre une vie totalement inventée par quelques mecs assis dans une salle pour pondre des scénarios, je ne saisis pas. Et même si V. est une adulte, majeure et vaccinée, je considère que Sex&The City est quelque part – et dans une moindre mesure – responsable de ce genre de dérives. Il faudrait que l’on arrête de faire de ce film une sorte d’emblème de toute une génération de femmes libérées, indépendantes, « célibattantes », « cougar » et autres néologismes à consonance commerciale. Oui Carrie, Samantha, Miranda et Charlotte ont incarné à un moment donné les nouveaux comportements sexuels, surtout ceux des femmes dites modernes (ça reste à définir), mais ça ne dépasse pas ce cadre. Retirez le sexe, et vous obtenez une espèce de caricature de la poufiasse assoiffée de chaussures valant deux SMIC. Heureusement, le film est quelque peu sauvé d’ailleurs par la plus sexuelle de toutes, Samantha, qui a réussi à me faire rire avec ses frasques et autres punchline. Ca en dit long sur le reste.

Vous l’aurez compris, SATC2 est un gros chou à la crème qui devient rapidement écoeurant, tant le cliché est omniprésent et la subtilité,rare. N’allez surtout pas le voir, comme une bonne partie du public américain, qui a boudé le film au point qu’il soit aujourd’hui considéré comme un flop aux Etats-Unis.

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